Depuis le déconfinement l’activité de nos entreprises a pu repartir. Un redémarrage aujourd’hui bien lancé mais qui occasionne de nombreuses difficultés compte tenu des strictes mesures sanitaires à mettre en œuvre. Néanmoins, une question se pose aujourd’hui quant aux lourds surcoûts engendrés et à leur prise en charge. Une problématique cruciale qui risque de compromettre une reprise durable de l’activité et de mettre en péril nombre d’entreprises qui ne pourront pas faire face bien longtemps si les mesures nécessaires ne sont pas prises. Tour d’horizon des premières annonces gouvernementales et des propositions défendues par la CAPEB.
La question des surcoûts est aujourd’hui au centre des inquiétudes des entreprises artisanales du bâtiment. Ces derniers peuvent être directs, liés aux nouveaux équipements de protection requis de type masques, ou indirects, en lien avec la nouvelle organisation du travail à mettre en place sur les chantiers et dans les ateliers.
Cette problématique est particulièrement préoccupante pour les entreprises artisanales car il faut concilier la nécessité d’une reprise d’activité et le respect des règles sanitaires.
D’autant que personne à l’heure actuelle ne semble vouloir les prendre en charge, hormis dans le cadre des marchés publics de l’Etat. Le problème reste entier pour les marchés privés et les marchés des collectivités locales. Aujourd’hui, 87 % des entreprises supportent entièrement les surcoûts (donc au détriment de leurs rentabilité et marges).
Des surcoûts importants et pas amortissables
Pour la CAPEB, il y a trois grands postes de surcoûts :
* la coactivité/productivité (allongement des délais, coordination, phasage complexe à organiser, location de nouveau moyen de transport …) engendrant un surcoût entre 4 et 10 % du coût journalier ;
* les équipements de protection (gants, masques, gel…) représentent entre 2 et 4 % du coût journalier ;
* la désinfection (décontamination, nettoyage du matériel, outillage supplémentaire…) représente entre 4 et 8 % du coût journalier.
Avec des situations très différentes dans le neuf et en rénovation. Les surcoûts sont plus élevés en rénovation notamment en site occupé, en général entre 10 et 20 % en entretien-rénovation contre 10 % dans le neuf.
Dans ce contexte incertain, nous pouvons craindre un effet durable de ces surcoûts en ce qui concerne ceux liés à l’organisation du travail qui seront sans doute durables.
Les propositions de la CAPEB pour ne pas aller dans le mur
Face à une situation inédite, la CAPEB demande des mesures concrètes
* la prise en compte des surcoûts liés à l’obligation de mesures de protections sanitaires des salariés et des clients face au Covid-19 ;
* la compensation des surcoûts des travaux, en moyenne estimés entre 10 et 20 %, en mettant en place des mesures compensatrices prises en charge par l’État (baisses et annulations de charges, compensation des surcoûts en agissant sur le couple activité partielle/chômage partiel) ;
* de mettre en place une concertation, menée par le maître d’ouvrage public ou privé, avec tous les acteurs concernés (entreprises et maîtrise d’œuvre) afin d’évaluer le surcoût budgétaire pour le chantier, et que les entreprises bénéficient d’une indemnisation.
Ces propositions sont vitales pour que nos entreprises sortent la tête de l’eau. L’enjeu est simple : survivre à la crise et permettre une reprise durable de l’activité.
Une question de survie pour les entreprises
Aujourd’hui, les entreprises artisanales ont redémarré leur activité mais elles doivent regagner de la rentabilité. Dans le contexte actuel, les marges sont au mieux extrêmement réduites, voire nulles, pour ne pas dire négatives dans bien des cas. Les artisans travaillent donc à perte du fait des surcoûts occasionnés. Une situation qui n’est évidemment pas viable !
Nous avons alerté le gouvernement pour que les aides aux petites entreprises du bâtiment soient reconduites et complétées pour compenser ces surcoûts.
Nos entreprises ne peuvent tout simplement pas absorber ces surcoûts. Si rien n’est fait ou pas suffisamment, des défaillances en série dans les semaines et mois à venir risquent de se multiplier. Jusqu’à présent les entreprises ont puisé dans leurs réserves, quand elles en avaient, et tiré au maximum sur leur trésorerie pour préserver leurs emplois mais si les aides d’urgence disparaissent trop vite, la situation deviendra intenable.
C’est pourquoi la CAPEB réclame, avec l’U2P, l’annulation des charges sociales et fiscales pendant cette période d’inactivité. Nous considérons que les entreprises ne pourront pas assumer ces charges tant qu’elles n’auront pas réalisé suffisamment de chiffre d’affaires.
Il est également nécessaire de compléter ces aides par des dispositifs de soutien aux artisans qui, reprenant leur activité, perdront le bénéfice des aides d’urgence et devront, en plus, faire face à des surcoûts sur leurs chantiers. Une double peine qui n’est pas envisageable !
Des premières annonces gouvernementales pas suffisantes
Pour la CAPEB, les mesures annoncées dans le cadre du troisième projet de loi de Finances rectificative n’apparaissent pas à la hauteur de la situation et de la crise à laquelle sont confrontées les entreprises artisanales.
Les pouvoirs publics doivent prendre conscience que la situation est grave. Aujourd’hui, le gouvernement n’en dit pas assez et il n’est pas possible d’attendre septembre pour un plan global pour le bâtiment.
Même si certaines mesures annoncées vont dans le bon sens, il manque une cohérence d’ensemble aux dispositions annoncées. Plusieurs questions restent en suspens. La participation de l'État aux surcoûts dans les marchés publics de l’État apparaît bien dans la circulairedu Premier ministre du 9 juin mais il faudrait une symétrie, c’est-à-dire une prise en charge des surcoûts par les Pouvoirs publics locaux dans le cadre des marchés des collectivités locales parce que les artisans et TPE du bâtiment sont principalement présents dans les marchés publics des collectivités locales et très peu dans les marchés publics de l’État.
La CAPEB souhaite un véritable plan de relance pour les artisans du bâtiment.
Chacun aujourd’hui, politiques comme consommateurs, doivent prendre conscience que nos entreprises, par définition de proximité, sont essentielles à la croissance française et à l’économie locale des territoires.
« Les surcoûts sont de 10% sur les chantiers de construction, et de 10% à 20% pour les travaux de rénovation, notamment énergétique. Ce n'est pas absorbable par nos entreprises. Quand on fait un bénéfice sur un chantier, la marge est entre 2,5 et 3%. Làon est en-dessous, on ne sort aucun bénéfice de ces chantiers en ce moment, ce n'est pas possible comme ça encore plusieurs semaines. Nous demandons un geste fort du gouvernement et des mesures concrètes pour nous relancer durablement»